Hommage à Michèle Rivasi de notre ami et ex administrateur d’AZB Antoine Richard.

Marseille, 16 décembre 2023

Je veux brièvement indiquer les conditions de ma rencontre avec Michèle. Et témoigner, à partir de ce contexte, de mon admiration pour ce qu’elle nous a apporté au cours de nos combats partagés, et de ce qu’elle nous laisse en héritage pour éclairer nos engagements actuels et à venir.

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Je suis membre de l’Association Zones Blanches (AZB) que Michèle a créée et préside depuis 2014. C’est l’un des outils qu’elle avait mis sur pied pour mettre au grand jour la cause des personnes souffrant d’intolérance aux ondes électromagnétiques artificielles, les électro hypersensibles (EHS). Antérieurement, Michèle avait contribué à créer le CRIIREM, « centre de recherche et d’information indépendant sur les rayonnements électromagnétiques non ionisants ». Le combat de Michèle dans le domaine de la santé environnementale était davantage connu sur d’autres thèmes.

Je connaissais Michèle de réputation et ce depuis 1987, l’année du nuage de Tchernobyl, arrêté à la frontière par décision du gouvernement…! La dénonciation des mensonges d’Etat sur le nucléaire et la création par Michèle de la Criirad, centre de recherche indépendant, avait jeté la lumière sur cette femme combattante, s’appuyant sur la science et l’expertise indépendante pour affronter les forces des puissants lobbies de l’industrie du nucléaire.

La pollution électromagnétique, ses effets sur le vivant et les dégâts sanitaires que provoque la communication sans fil par la prolifération des ondes électromagnétiques pulsées est le domaine dans lequel mon chemin a croisé la démarche de Michèle, chef de file politique d’un combat difficile mené en France et au niveau européen.

Je rappelle que l’Etat en France ne reconnait toujours pas le lien de causalité entre les symptômes dont souffrent les EHS et l’exposition aux ondes artificielles alors que de multiples recherches indépendantes, en France comme à l’étranger, apportent la preuve contraire.

La pollution électromagnétique est l’une des plus difficiles à combattre : d’une part elle est invisible et d’autre part elle est liée à des habitus sociaux très forts (Qui acceptent de limiter l’utilisation de son portable, l’accès par le Wifi, par la téléradio aux communications avec le monde ? Quel maire de commune est prêt à accepter que son territoire soit en zone blanche ? Sans parler, aussi et surtout, des immenses conflits d’intérêt avec les enjeux financiers considérables des opérateurs de téléphonie sans fil et de communication par l’informatique.

Michèle n’ignorait pas ces difficultés, raison de plus pour elle de les affronter si l’on voulait prendre au sérieux la santé publique et la survie de nombreuses victimes des ondes électromagnétiques artificielles. Sa détermination et son engagement sur la durée envers les EHS se nourrissaient de la rencontre et de l’écoute des personnes victimes des ondes. C’est en ce point que nos chemins se sont croisés.

En 2015, je rencontrai dans les Alpes de Haute Provence une jeune femme, EHS extrême, vivant dans une cabane forestière dans le vallon de Mouresse, en pleine forêt du Montdenier, isolée de tout, dans la plus grande précarité et insécurité. C’était pour elle un lieu de refuge relativement abrité de la pollution électromagnétique. Dépendante de la solidarité de quelques 3 ou 4 personnes, ignorée des services sociaux, sans accès aux soins, non reconnue par les services de l’Etat, elle était là, dans une sorte de prison sans murs dont elle ne pouvait sortir sans risque de souffrances insupportables liées à l’impact des ondes. A son contact et ce pendant des années, j’ai beaucoup appris sur la problématique des EHS, sur les symptômes physiologiques et sur le handicap social d’exclusion de la société. J’ai exploré alors la littérature sur cette problématique que je découvrais. Ma première lecture, je la dois à Emma qui m’a signalé les actes d’un colloque intitulé « Pour la reconnaissance de l’électro sensibilité », organisé par Michèle Rivasi et Laurence Abeille en février 2016 à l’Assemblée nationale. J’en recommande la lecture. Ce fut le point de départ de ma rencontre avec Michèle et avec le noyau actif de l’association Zones Blanches dont je rejoignais le conseil d’administration en 2018.

De ces années de partage avec l’équipe animée par Michèle pour faire valoir les droits des EHS et pour faire reconnaître les enjeux de santé publique que recouvre la pollution électromagnétique, je retiens les principaux traits qui constituent l’hommage que je lui rends aujourd’hui devant vous.

Michèle, femme de cœur et de courage, remarquable de simplicité et de bienveillance, une femme de terrain allant à la rencontre des personnes qui vivent dans des conditions parfois innommables de souffrances physiques et d’isolement social

Ainsi en 2012 va-t-elle rendre visite à 2 femmes (Anne et Anne-Marie) qui, pour échapper à l’impact des ondes, se sont réfugiées dans une grotte en montagne (la grotte de Baumuge, sur la commune de saint Julien en Beauchène (05). Elle est révoltée en voyant les conditions de précarité matérielle et d’exclusion sociale dans lesquelles se trouvent ces 2 femmes.

Déjà en 2010, elle soutient une action d’occupation de la forêt de Seou, dans la Drôme, par un bon nombre d’EHS-MCS qui revendiquent « Une terre pour les EHS »

Tout au long de la période 2014-2023 elle se rend plusieurs fois auprès de personnes vivant dans la plus grande précarité et insécurité, dans des caravanes, ou autres abris de fortune, en forêt ou dans un vallon montagneux. Ces personnes sont de plus en plus menacées par l’implantation de nouvelles antennes radio qui viennent impactées leur lieu de refuge (cf. le plan new deal de l’Etat avec les 4 opérateurs de téléphonie mobile pour supprimer toutes zones blanches en France). Elles ne savent plus où aller se réfugier. Interpellée sur certains cas lourds, Michèle va sur le terrain, rencontre les autorités locales et demandent, avec insistance, des réponses concrètes à des situations d’urgence. J’ai pu le vérifier dans plusieurs circonstances.

Encore en juillet dernier, à Digne, à la suite de nombreux courriers et en lien avec un comité de soutien local à Philippe Tribaudeau, personne EHS menacée par l’implantation d’une nouvelle antenne, elle obtient du Préfet un moratoire et un engagement à rechercher une sortie positive (affaire est en cours).

Dans les dernières années, Michèle lance des appels aux victimes de la pollution électro magnétique : « montrez-vous, sortez de l’ombre, faites connaître votre handicap, exigez la prise en compte de vos difficultés devant les Maisons Départementales Pour Handicapés, faites valoir vos droits, participez au travail de reconnaissance de l’électro hypersensibilité.

Michèle, femme de projet et d’actions.

En 2014, je l’ai dit, elle crée AZB comme outil d’action en lien direct avec le monde des électro hypersensibles. Sur un coin de table d’un café à la gare TGV de Valence, elle dessine des avant- projets de zones blanches : des lieux peu impactés par les ondes, à aménager pour servir de refuges pour des EHS, mais aussi des lieux d’observation, de diagnostic et de recherche pour faire avancer la connaissance et la reconnaissance de ce nouveau fléau de santé publique : Accueillir, soigner et faire reconnaitre par la recherche les EHS.

De 2018 à 2021, Elle mobilise des institutions, des moyens financiers, des compétences dans divers domaines (santé, architecture, travaux publics…) pour étudier la faisabilité d’une grande Zone Blanche aménagée sur le plateau de Durbon (commune de Saint Julien en Beauchène 05) ; Le projet est sérieusement étudié ; il s’agit de récupérer et réhabiliter des bâtiments à l’abandon dans une ancienne chartreuse à 1300 m d’altitude, ayant servi à des colonies de vacances et mis en vente par la CAF de Marseille. Le projet est suspendu depuis 2 ans par manque d’appui des autorités locales et préfectorales.

Mais le combat continue : la recherche de projets de sites aménagés se poursuit dans plusieurs départements en lien avec des acteurs locaux pour des zones aménagées de moindre dimension, plus décentralisées. Des terres de ressourcement à bâtir avec l’investissement des EHS eux-mêmes.

Michèle, une femme de combat politique, qui ne lâche jamais le morceau

En 2019, auprès de la préfecture des Hautes Alpes, Michèle intervient auprès des autorités locales pour soutenir le combat des EHS sur le territoire. Je me souviens de son intervention auprès de la préfète des Hautes Alpes pour faire prendre en considération la situation très périlleuse dans laquelle se trouvait cette jeune femme EHS vivant dans un vallon du Dévoluy, menacée par un projet d’antenne risquant d’impacter son dernier refuge possible. Par son intervention elle donnait de la force au collectif des habitants opposés à l’implantation de la nouvelle antenne. La résistance s’est organisée sur plus d’une année, aboutissant, une fois n’est pas coutume, à un retrait du projet d’antenne sur la commune de Montmaur (C’était juste avant les ordonnances de mars 2020 permettant aux opérateurs de contourner les autorisations des maires pour les choix d’implantation des nouvelles antennes radio).

En 2021-2023, auprès de la préfecture des Alpes de Haute Provence, la même démarche est engagée. Je l’ai évoqué précédemment. Michèle agit sur la durée. Elle inspire le respect de tous ces interlocuteurs par sa capacité d’écoute sur le terrain, sa détermination, sa rigueur et sa force de conviction, autant de qualités mise en œuvre en faveur de ceux qui souffrent d’une politique qui nie les méfaits sur leur santé des technologies de communication sans fil.

Au niveau européen, Michèle Rivasi était une des très rares « politiques » à avoir conscience des dégâts sanitaires provoqués par les ondes électromagnétiques artificielles. En bonne scientifique, elle s’appuyait toujours sur des faits et des recherches non truquées pour combattre les « négationnistes » financés par les industriels du secteur de la téléphonie mobile niant les effets biologiques des OEM et leur impact en cancérologie. Sa qualité de scientifique, sa rigueur dans l’argumentation forçaient le respect de ses interlocuteurs.

En 2023, Michèle Rivasi porte à nouveau la question des OEM à l’échelle européenne. Deux ateliers sont organisés en février puis en avril : l’un sur les enjeux des ondes : pour témoigner des situations alarmantes que vivent les EHS /MCS, en partenariat avec la coalition « Europeans for safe Connections ». L’autre sur les EHS et l’état de la science.

J’ai voulu dire quelques mots sur le combat mené par Michèle pour faire reconnaitre l’EHS et prendre au sérieux les conditions de vie difficiles et parfois inhumaines des victimes des rayonnements électromagnétiques. Dire aussi que la démarche initiée et développée par Michèle Rivasi, avec notamment l’association Zones Blanches, ne s’éteindra pas avec elle. D’autant plus que le mal s’étend. De plus en plus de personnes sont déclarées EHS et subissent un handicap réel. L’ANSES dans son dernier rapport de mars 2018 évaluait déjà la prévalence en France de l’ordre de 5% de la population (près de 3,5 millions de personnes).

Et pour conclure, je retiendrai, outre les sentiments de chaleur humaine qui se dégage de la personnalité de Michèle, trois de ses apports fondamentaux :

• Michèle, sur la question de la pollution électromagnétique et de l’électro sensibilité comme enjeu de santé publique, nous a ouvert les portes du monde politique et institutionnel. Merci !

• Michèle, reconnue pour ses compétences scientifiques, relationnelles et pédagogiques a permis de rendre visible la réalité des personnes EHS souvent cachées, mises à l’écart de la société, laissés pour compte par l’Etat. Des avancées existent aujourd’hui, notamment pour la reconnaissance du handicap par les MDPH dans les départements.

• Michèle, par son authenticité, sa franchise, son franc parlé, son accessibilité, sa rigueur, son courage politique, sa liberté de penser, nous laisse un modèle d’action politique, une méthode. A nous de nous en saisir ; l’héritage est précieux !

Avec quel relai politique ? Michèle, déjà tu nous manques…

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Hommage à notre présidente Michèle RIVASI !

Le décès subit de Michèle RIVASI ce mercredi 29 novembre 2023 après un arrêt cardiaque, suscite une vive émotion et une profonde tristesse au sein de notre association et de la famille des personnes EHS-MCS.
Si elle était très connue sur le plan politique pour ses combats sur le nucléaire, le glyphosate ou encore les lobbys pharmaceutiques, Michèle par ses différents mandats nous ouvrait les portes du monde politique.
Ses compétences scientifiques, relationnelles et pédagogiques permettaient à la cause des hypersensibles d’être entendue.
Sa formation universitaire et son exigence de rigueur scientifique en faisait une femme politique exceptionnellement attachée à la preuve et à la vérité. Son excellence en politique donnait aux questions scientifiques et sanitaires un espace de parole vraie dans les assemblées parlementaires. En cela Michèle était unique. Un phare rendant visible la réalité des personnes EHS-MCS.
En 1986 elle avait fondé l’associations la Criirad (Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité) au lendemain de Tchernobyl et en 2005 le Criirem (Centre de Recherche et d’Information Indépendant sur les Rayonnements Électro Magnétiques non ionisants).
En 2012, elle avait été touchée par les conditions de vie et la santé de deux femmes extrêmement électrohypersensibles contraintes pour leur survie de se réfugier dans une grotte à Baumugne, située sur la commune de Saint-Julien-en-Beauchêne dans les Hautes-Alpes. A la suite de cette situation Michèle rencontrera Jean-Claude Gast, alors maire de la commune, et l’association Zones Blanches verra le jour en 2014.
Fonceuse, femme de terrain, toujours partante pour soutenir, rencontrer, discuter et rechercher les solutions appropriées, nous saluons son courage et sa personnalité unique.

Rappelons quelques temps forts :

    • En 2010 et 2011, elle soutient l’action d’occupation de la forêt de Saoû, puis elle organise une rencontre à Riou froid en 2014 avec l’Anses, la préfecture, la MDPH, l’ONF et les associations ;
    • En 2016, elle coorganise une conférence pour faire reconnaitre l’électrohypersensibilité à l’assemblée nationale en présence de la députée Laurence Abeille et du professeur Belpomme;
    • Elle se rend de nombreuses fois à St-Julien-en-Beauchêne pour travailler sur le dossier « Durbon », un séjour « test » est organisé en 2016 avec des personnes EHS et il y aura plusieurs réunions sur la faisabilité du projet avec Soliha Provence (bailleur social) ;
    • En 2019, elle rencontre les Zurichois ayant construit un immeuble pour des personnes EHS-MCS ;
    • Elle rencontre de multiples partenaires institutionnels (Préfets/ètes, ARS, élus etc.) et privés et soutient de nombreuses personnes ;
    • En 2022, elle organise et anime la réunion publique « Changeons de regard sur l’EHS » à Veynes (05) ;
    • En 2023, elle porte la question des ondes électromagnétique à l’échelle Européenne. Deux ateliers seront organisés en février et avril au parlement européen sur le thème « Les enjeux des ondes » et sur « l’EHS, l’état de la science » ;
    • Dernièrement en septembre et en juillet, elle participait à des réunions de travail avec un préfet afin de trouver une solution d’habitat digne pour une personne EHS.

On retiendra d’elle son authenticité, sa franchise, son franc parler, son accessibilité, sa convivialité, sa simplicité, son courage politique et son combat pour le respect des droits humains et de la santé. Sa liberté de penser et d’action lui permettait de soutenir une multitude de projets.
Nous étions tous très attachés à elle et partagions des valeurs communes.

Nous continuons à construire la route fléchée par toi Michèle et poursuivons ton travail diplomatique de conviction, avec l’intensité de ta détermination et de ton engagement, ton dévouement et le courage que tu nous lègues.

AZB continue le combat pour les EHS-MCS, contre toutes les pollutions environnementales.

Merci Michèle ! AZB est vivante !

Etude SEPIA, recherche de volontaire !


Des EHS volontaires sont recherchés, dans le cadre de l’étude SEPIA, étude nationale « EHS » intitulée : « améliorer le recueil des données cliniques pour l’étude de l’hypersensibilité aux champs électromagnétiques » qui a pour but de mieux définir l’électrohypersensibilité, afin que celle-ci puisse être mieux prise en compte dans la recherche scientifique et la pratique médicale. Aujourd’hui, il s’agit d’étendre dans plusieurs régions l’étude de faisabilité réalisée en Bretagne entre 2017 et 2019, pour produire de nouvelles connaissances en croisant les discours sur le « vécu du quotidien » avec les données médicales. Le caractère innovant du protocole est d’être fondé sur la conduite de 3 entretiens successifs au domicile de personnes électrohypersensibles volontaires.

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L’équipe Sépia souhaite aller à la rencontre de toutes les personnes EHS, et notamment celles qui ont été contraintes de s’éloigner voire de s’isoler des sources d’exposition potentielles. Votre participation implique d’accepter un entretien sociologique suivi d’un entretien épidémiologique, puis d’un examen médical qui sera assuré par un médecin du Centre régional de pathologies professionnelles et environnementales de votre région, dans un intervalle de quelques semaines.

Il reste 30 places pour des personnes domiciliées dans le Puy-de Dôme et l’Allier ainsi que 8 places en Ardèche, Loire et Haute-Loire. Contact : SEPIA Santé : 8 mail Jeanne Villepreux Power 56100 Lorient OU ehs.sepia@gmail.com, ou via le numéro 07 88 49 70 73. Contact : eha.sepia@gmail.com et jouanneau.charlene@gmail.com

Télécharger la Lettre info Etude Sépia

AZB – Soutien à Philippe TRIBAUDEAU – 20 juillet 2023

Le 20 juillet dernier une manifestation était organisée devant la préfecture de Dignes-Les-Bains pour soutenir Philippe Tribaudeau (EHS-MCS). L'association zones blanches était reçue par M.Le Préfet Marc Chappuis, Mme Anne-Marie Durand directrice départementale de la protection des personnes du 04 et les services de l'ONF.
(Photographie Laure Birgy)